Effervescence à l’atelier : il faut préparer, et bien préparer l’expo qui démarre vendredi et se continue tout le week end .
Alors, derniers encadrements, premiers accrochages, peut-être pas définitifs, et surtout rangement, déplacement de choses, de machines, et d’outils.
Parce que dès samedi, deux consoeurs me rejoignent à l’atelier : Marthe Rougieux enluminure, et Celine Prud’homme travail du cuir. Et à trois, il faut de la place. Mais ce sera prêt, c’est sûr !
Et pour éviter l’ennui (!) j’accueille un jeune stagiaire de 3ème, qui vient en observation : il participe à l’agitation, et … n’en pense certainement pas moins !
Comme on était bien partis pour un confinement long, je me préparais à graver une longue linogravure : 5 personnages équipés de pelles, râteau, balai, au milieu de près de 160 livres.Avec dans le ciel d’autres livres qui s’envolent. Voici le premier dessin et le report sur la plaque lino de 480/140 mm
J’ai fini de graver la première version de la plaque : je vais pratiquer la technique de la plaque perdue. Je commence par enlever tous les « blancs » et ensuite j’imprime avec la couleur la plus claire. Ici ce sera le gris, et ensuite le noir. Comme je vais utiliser des papiers de différents aspects : blanc pur, ivoire, crème, écru, je vais utiliser le « blanc » du papier pour faire le gris : tout d’abord j’imprime en noir sur un papier brouillon : vieux journaux, papier de rebut, peu importe. Et, sans ré-encrer, j’imprime encore sur papier brouillon jusqu’à ce que le reste d’encre donne un beau gris, et là j’imprime sur le vrai papier.
J’en suis à cette phase : j’ai un peu plus d’une dizaine de feuilles imprimées en gris. Maintenant je vais graver le gris : c’est-à-dire que je vais enlever tous les gris de l’image pour imprimer en noir ! Bon, tout ça c’est de la technique, pour ne pas dire que « coup de balai sur les livres », purée ! qu’est-ce que ça me parle ! Surtout en ce moment !
Et voilà, c’est fait : les tirages en deux couleurs, un gris variable et un noir profond. Les livres et la balayeurs sont à vous maintenant, qui les regardez. C’est vous qui inventerez, découvrirez, créerez une histoire autour d’eux : quand l’image est faite, elle appartient à celui qui la regarde – bon, aussi et d’une autre manière à celui qui l’achète !
C’est vrai qu’on est bien dans son atelier, à imaginer, dessiner, graver.. Mais c’est long quand même, quand on ne voit personne ! Alors, après m’être gonflé à bloc, rechargé en optimisme à 10000 volts, croyant dur comme plomb que ça ira mieux demain, je me suis lancé dans la réalisation d’une petite affiche pour une improbable, mais probable peut-être, ouverture de l’atelier au public avant Noël. Et ça fait du bien : voilà un projet avec une date certaine, alors en avant !
Pour la réalisation pratique, j’utilise une typo « égyptienne italique » que je me suis offerte l’an dernier pour Noël justement !Et pour agrémenter le texte, j’ai réalisé en lino un énorme « A » . Comme il manquait un « r » j’en ai gravé un aussi. J’y ai passé la journée, entre choix des autres polices, des petites gravures, et réalisation de cales de blocage en pente ! Mais quel pied, bonheur, plaisir …
Ma toute dernière linogravure s’intitule « Rêve de lectrice ». Elle s’installe dans ma série de livres oniriques, de lecteurs et de lectrices atypiques, les livres constituant depuis toujours mon univers reposant, de créativité, d’évasion.
J’espère que plusieurs niveaux de lecture, d’interprétation, de compréhension existent bien. La création de cette image s’est faite doucement.
Elle a commencé par l’olivier, oublié pour ne garder que ses feuilles, par ma femme, en arrière plan, à la fenêtre, par un livre qui trainait sur une table, et tout s’est soudainement organisé pour me donner littéralement cette image.
/C’est maintenant à vous, lecteur, spectateur, visiteur, de continuer la création en donnant un sens à tout ça !
Lorsque j’ai retrouvé la vieille photo de mon père datant des années 1940-1950, j’ai de suite pensé à en faire une gravure : c’est une photo en noir et blanc, bien exposée, mais avec peu de gris : du blanc & du noir.
Mais ce qu’elle me dit est de l’ordre du privé : il est donc nécessaire de l’insérer dans un autre univers, pas forcément compréhensible, comme raconter une histoire improbable, en dehors du réalisme, mais cependant bien concrète.
J’ai choisi les livres : ils sont depuis l’enfance des compagnons loyaux et toujours là. Alors, l’armoire de la photo devient une énorme caisse à livres, un peu percée, qui les laisse s’essaimer à tous vents, comme des semailles de culture : ça me plaît bien.
Question technique, d’une photo abimée, pas vraiment nette, j’ai au contraire voulu faire une gravure soignée, bien léchée, précise autant que peut l’être le support gravé, comme si tout ce qu’elle dit se passait maintenant. J’ai donc choisi des traits nets pour les roues à côté des aplats bien noirs de la mule. J’y ai passé 4 heures à dessiner, gommer, redessiner, décalquer les formes, puis 9 heures à graver, par périodes de 3 heures maxi.
L’automne s’installe, et le poêle de l’atelier ronronne. Comme le disait ma petite fille Lou, « la fumée fait des pirouettes, des fois ». Mais dans la douce chaleur de l’atelier la lino continue : des projets presqu’achevés, d’autres en gestation.
L’expo collective « Estiv’art » à laquelle je participe à Mesquer s’est installée dans le magnifique espace de la Maison du Patrimoine.
J’y ai mis mes dernières créations : « Les livres-toits », « L’attrapeur de lune », « La pêche dorée », « Les peintres », « Déluge » et d’autres plus anciennes : « Reflets bleus », « Balayeuse de livres », « Contrejour bleu » « Aux arts citoyen » et d’autres encore !
On s’était installés Cathy et moi pour une semaine à Lanséria, à Quimiac, dans une roulotte de camping, et on a redécouvert les plaisirs du bord de mer, avant de quitter tout ça avec un ciel éblouissant samedi soir !